Éditions Sorman

80 tiers-lieux, actifs ou en projet, vont se partager 9 M€ de financement de l’ANCT en 2025-2027, d’après le palmarès publié le 28 octobre dernier. Comme l’expliquait en préambule Françoise Gatel, la ministre déléguée chargée de la Ruralité, du commerce et de l'artisanat, « dans les territoires, les tiers-lieux permettent une offre culturelle de proximité, d’innovation sociale et de relocalisation artisanale et agricole ». Ce dispositif créé en 2020 intéresse toujours plus de collectivités, auxquelles il laisse une grande marge de manœuvre pour porter des projets d’intérêt local par le biais d’associations.

Un soutien à l’animation locale

A Saint-Claude (Jura, 8 727 habitants), « La Fraternelle », labellisée « Fabriques de territoires » 2024, est une ancienne coopérative ouvrière créée en 1871 et transformée en tiers-lieux. Un site stratégique pour ce bassin industriel du Haut-Jura en déprise qui perdu plus d’un habitant sur cinq depuis 2010 et, du même coup, 1,2 M€ de dotation de solidarité urbaine (DSU). « Sur 370 000 € de subvention aux associations, 35 000 €, soit près de 10 %, vont à la Fraternelle », souligne le maire, Jean-Louis Millet, qui a également commandé une demi-douzaine de spectacles pour les écoles (23 000 €). Un moyen de soutenir cette structure vitale pour l’animation locale. Avec son bâtiment de 4 000 m² sur sept niveaux, comprenant, entre autres, trois salles de cinéma, des résidences d’artistes, des ateliers dédiés au spectacle vivant et à l’expression artistique, un café qui accueille des débats, La Fraternelle doit boucler un budget annuel de 1,3 M€. La moitié des recettes provient du cinéma, or sa fréquentation a diminué depuis le Covid, alors que la demande pour les autres prestations du tiers lieu reste soutenue. « C’est une ruche : 50 000 personnes sont passées l’année dernière », indique Christophe Joneau, le directeur de La Fraternelle, qui ouvre 7 jours/7 pour un public venu parfois de communes voisines. L’équipe, composée de 14 permanents, fait vivre « l’esprit collectif » grâce à la mobilisation de bénévoles et des contacts directs entre le public et les artistes qui se restaurent et dorment sur place. En apportant 100 000 € sur trois ans, le dispositif Fabriques de territoire apporte une aide bienvenue pour payer les charges courantes sans réduire la variété des prestations. « Nous envisageons quelques animations supplémentaires au café, et de défrayer les intervenants », précise Christophe Joneau.

Mettre en avant l’originalité des projets

Pour obtenir ce financement, par un appel à projets, La Fraternelle a mis en avant l’originalité de son projet avec ses multiples activités, sans équivalent sur le territoire. Les services instructeurs de l’État ont également été sensibles au diagnostic territorial présent dans le dossier et à la capacité de mobilisation des bénévoles et des partenaires. Selon les projets, La Fraternelle travaille en effet avec des acteurs aussi divers que l’aide sociale l’enfance, un centre dédié à l’environnement, un conservatoire de musique, des associations consacrées aux jardins partagés ou au handicap...

Encourager l’agriculture durable

Situé à Ambricourt (Pas-de-Calais, 128 habitants), une des communes les plus petites et rurales du département, « Le Germoir » est également Fabriques de territoires pour la deuxième année consécutive. « Cette aide a été un levier essentiel pour nous en 2021, en permettant l’essor du lieu et des actions », indique Noémie Hilmoine, responsable du développement de ce tiers-lieux, créé dans une ancienne ferme et dédié à l’agriculture durable et solidaire. Ici pas de nouvelles technologies mais la volonté de valoriser les ressources de la terre. « Nous accompagnons les porteurs de projets avec un espace de test agricole où les maraîchers peuvent mutualiser leur pratiques et leur matériels. Le Germoir est à la fois un démonstrateur, un lieu de production et de transformation, un accompagnateur et un relais pour développer des pratiques ». Il intéresse également des collectivités qui ont recours à son expertise pour leur projet alimentaire territorial (PAT). Cette approche diversifiée a convaincu l’ANCT. 100 000 € financeront notamment une conserverie afin que les agriculteurs valorisent leur excès de production de fruits et légumes. Une aide supplémentaire pour que le tiers-lieux conforte son équilibre budgétaire.

Jean-Philippe ARROUET le 26 novembre 2024 - n°2341 de La Lettre du Maire