Faut-il recourir à la dispense de procédure pour les marchés de travaux inférieurs à 100 000 € HT ? Abonnés
Une pérennisation du seuil de dispense de procédure pour les marchés de travaux inférieurs à 100 000 € HT
Dans le rapport sur le coût du millefeuilles administratif, la « mission Boris Ravignon » a estimé que revoir les règles et l’organisation de la commande publique permettrait de la rendre plus efficace, ce qui l’a conduit à proposer certaines mesures :
- faciliter le recours aux groupements de commande en assouplissant les règles pour les petits groupements et en permettant aux collectivités n’y participant pas initialement de rejoindre un groupement avec l’accord des autres membres ;
- supprimer, concernant les marchés de fournitures et de services au-delà de 90 000 €, la publicité obligatoire au bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ;
- relever les seuils de passation d’un marché à procédure adaptée de 40 000 € à 150 000 € pour les fournitures et services, et de 100 000 à 250 000 € pour les marchés publics de travaux.
Ces hypothèses de relèvement des seuils de publicité et mise en concurrence semblent radicales pour les acheteurs publics. Toutefois, selon divers sondages, ils seraient majoritairement favorables à la pérennisation du seuil de 100 000 € relatif à la dispense de publicité et de mise en concurrence pour les marchés de travaux.
Sur ce sujet, la Direction des Affaires Juridiques du ministère de l’Economie vient justement de mener une consultation qui devrait, en autres, aboutir à la fixation de ce seuil dans le code de la commande publique (CCP). Rappelons que l’article R. 2122-9-1 du CCP prévoit les dispositions suivantes, actuellement en vigueur jusqu’au 31 décembre 2024 :
« L'acheteur peut passer un marché public sans publicité ni mise en concurrence préalables portant sur des travaux, fournitures ou services innovants au sens du second alinéa de l'article L. 2172-3 et répondant à un besoin dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros hors taxes ».
Comment apprécier le seuil de 100 000 € HT ?
Les services opérationnels ne peuvent pas diviser artificiellement leur besoin pour bénéficier de la dispense de procédure ; ils doivent en effet raisonner à l’échelle d’une opération. En matière de marchés de travaux, la valeur estimée du besoin est déterminée en prenant en compte la valeur totale des travaux liés à une opération ainsi que la valeur totale estimée des fournitures et des services mis à la disposition du titulaire par l'acheteur, lorsqu'ils sont nécessaires à l'exécution des travaux (art. R. 2121-5, CCP).
Dans les faits, il y a opération de travaux lorsque l'acheteur prend la décision de réaliser, dans un temps et un périmètre limités, un ensemble de travaux caractérisé par son unité fonctionnelle, technique ou économique.
Passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables ne nécessite pas la sollicitation de 3 devis
Bien que la dispense de procédure pour les marchés de travaux inférieurs à 100 000 € soit une aubaine pour les services opérationnels, les services de la commande publique peuvent craindre une mauvaise utilisation de cette disposition.
Rappelons la très controversée jurisprudence du tribunal administratif de Strasbourg du 16/05/2024 (n° 2108389) : le juge administratif a précisé que, lorsque les services opérationnels sollicitent plusieurs devis, la procédure ne relève plus des marchés passés sans publicité ni mise en concurrence mais de l’article L. 2123 du CCP, car il s’agit d’un marché passé selon une procédure adaptée. Dans ce cas, le formalisme, bien qu’il soit allégé, doit tout de même respecter les règles suivantes :
- l’acheteur public doit informer les entreprises sollicitées des critères de sélection des offres ;
- il doit informer les entreprises non-retenues en précisant les caractéristiques et avantages de l'offre retenue et le nom de l'attributaire du marché.
Contractualiser le cahier des clauses administratives générales (CCAG), même en dessous du seuil de 100 000 €
La contractualisation du CCAG paraît une évidence, mais l’acheteur public doit notamment veiller à le référencer dans les pièces contractuelles, quelle que soit la modalité de mise en concurrence.
Il a également tout intérêt à le contractualiser dans les marchés sans publicité ni mise en concurrence préalables prenant la forme d’un simple bon de commande, en précisant, par exemple, « commande effectuée dans le cadre du cahier des clauses administratives générales… ».
Olivier Mathieu le 26 novembre 2024 - n°2341 de La Lettre du Maire
- Conserver mes publications au format pdf help_outline
- Recevoir par mail deux articles avant le bouclage de la publication.help_outline
- Créer mes archives et gérer mon fonds documentairehelp_outline
- Bénéficier du service de renseignements juridiqueshelp_outline
- Bénéficier du service InegralTexthelp_outline
- Gérer mon compte abonnéhelp_outline