Les arrêtés d’ouverture des commerces non-essentiels : légitimes mais illégaux Abonnés
Point de procédure : les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit à partir du moment où ils ont été publiés ou affichés et transmis au préfet (article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales - CGCT). Les préfets peuvent demander aux maires de retirer leurs actes, ou saisir le tribunal administratif, en parallèle ou directement, d’un déféré (article L. 554-1 du code de justice administrative). Le préfet peut accompagner son recours d’une demande de suspension qui laisse au juge un délai d’un mois pour se prononcer. Par exception, le préfet peut obliger le juge à suspendre l’acte du maire dans les 48h s’il prouve qu’il porte atteinte à une liberté publique ou individuelle (article L. 2131-6 du CGCT). Nous ne voyons pas quelle liberté publique le préfet pourrait invoquer contre l’acte du maire, sachant par ailleurs que le juge administratif n’a pas encore consacré de « droit à la santé » (peut-être changera-t-il sa jurisprudence dans le contexte de la crise sanitaire).
Point de droit : si le préfet saisit le juge administratif d’un déféré-suspension, il doit prouver qu’il existe une urgence à suspendre et des « moyens de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l’arrêté » du maire. Deux hypothèses : d’abord, le décret du 29 octobre 2020 instaurant un confinement sur l’ensemble du territoire donne au Premier ministre un pouvoir de police spéciale. Dans ce cas de combinaison des pouvoirs de police, le maire ne peut exercer son pouvoir de police générale que pour aggraver la mesure prise par le pouvoir de police spéciale (en l’occurrence, la fermeture des commerces non-essentiels, arrêt du Conseil d’État du 18 avril 1902, n° 04749).
Enfin, il pourrait même être envisagé que le préfet exerce son pouvoir de substitution s’il arrive à démontrer une carence du maire dans l’exercice de son pouvoir de police. Dans ce cas, il doit obligatoirement avoir mis en demeure le maire. Cette mise en demeure doit être restée sans résultat pour qu’il puisse se substituer au maire. Par exception, le préfet peut directement se substituer au maire « en cas d’urgence » (article L. 2215-1 du CGCT). Par ailleurs, la loi du 11 mai 2020 prévoit qu’en cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d’urgence, le ministre de la Santé peut habiliter le préfet, pendant et après la fin de l’état d’urgence sanitaire, à prendre toute les mesures d’application nécessaires pour prévenir et limiter les conséquences possibles sur la santé des populations (article 8 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020).
Déborah Thebault le 03 novembre 2020 - n°2153 de La Lettre du Maire
- Conserver mes publications au format pdf help_outline
- Recevoir par mail deux articles avant le bouclage de la publication.help_outline
- Créer mes archives et gérer mon fonds documentairehelp_outline
- Bénéficier du service de renseignements juridiqueshelp_outline
- Bénéficier du service InegralTexthelp_outline
- Gérer mon compte abonnéhelp_outline