Comment fixer les indemnités des élus au plus juste ? Abonnés
Rendre transparent le régime indemnitaire des élus
Paradoxalement, nombre de maires redoutent de voter leur indemnité au plafond, au risque de se voir accusés par leur population de « s’en mettre plein les poches ». Contrairement au statut des fonctionnaires, l’État ne fixe pas le régime indemnitaire des élus pas plus qu’il n’en compense intégralement le coût pour les budgets locaux. Charge au élus de s’attribuer leurs propres indemnités. Terrain glissant. « On les vote en conseil municipal mais il est rare que du public y assiste », déplore Philippe Moisson, maire de Saint-Loup-des-Chaumes (Cher, 301 habitants) et président de l’Association départementale des maires. « Quand vous êtes salariés d’une entreprise, ce n’est pas vous qui vous attribuez votre propre salaire ! ». Une impression d’entre-soi préjudiciable à l’image de probité des élus locaux, même si elle peut se contrer par un effort de transparence. Sur son site, Eybens (Isère, 10 099 habitants) ne se contente pas de mettre en ligne la délibération relative aux indemnités de ses élus, elle les justifie : « être élu n’est pas un métier, c'est un engagement. L'indemnité des élus ne doit pas être considérée comme un salaire mais comme une compensation nécessaire pour s’investir, être présent et disponible, en lien avec les services municipaux et métropolitains. Elle compense notamment la réduction du temps de travail professionnel ».
Ajuster le montant des indemnités
Eybens a également fait un geste en renonçant à percevoir les 15 % de majoration de l’enveloppe indemnitaire à laquelle elle avait droit en 2020. A Saint-Loup-des-Chaumes, Philippe Moisson a aussi renoncé à percevoir une revalorisation de son indemnité de maire (de 695 € à 1041 € bruts mensuels). « Je ne l’ai pas appliquée pour des raisons liées au budget de la commune », explique-t-il. L’augmentation aurait coûté 18 000 € par an sur un budget de 200 000 €. En y renonçant, le maire préserve un petit excédent budgétaire en section de fonctionnement qui demeure un des rares moyens pour cette petite commune de dégager une capacité d’investissement (20 000 à 30 000 € par an). Quant à la revalorisation par la DPEL, censée compenser, c’est un leurre : si Philippe Moisson avait revalorisé les indemnités municipales, sa DPEL aurait augmenté de 3 000 € à 5 000 € , laissant à la commune une charge nette de 13 000 €.
Par ailleurs, dans un contexte économique pesant sur le pouvoir d’achat de la population, certains maires ne voient pas d’autre choix que de faire un geste sur le montant de leur indemnité. Comme Patrick Morel, maire de Réaumont (Isère, 1 029 habitants,). En avril 2022, il a baissé la sienne de 2 007 € à 1 517 €. « Ce fût une décision collégiale de ma part, des adjoints (leur indemnité a été réduite de 187 €) et des conseillers, car on avait augmenté les impôts de 11 % », explique-t-il. Un choix contraint par la disparition, insuffisamment compensée, de la taxe d’habitation. « Les gens n’étaient pas contents car leurs salaires n’augmentaient pas de 11 % », résume le maire, qui a opté pour une diminution de 22 % même si, « par rapport au temps de travail les samedis, les dimanches et le soir, c’est un peu juste », concède-t-il.
* « Des maires engagés mais empêchés », disponible sur www.amf.asso.fr/documents-cinquieme-enquete-observatoire-la-democratie-proximite-amf-cevipofsciences-po-des-maires-engages-mais-empeches-/41958/
** Rapport d’information n°121 relatif au statut de l’élu, du 16/11/2023, consultable sur www.senat.fr/notice-rapport/2023/r23-121-notice.html/
Jean-Philippe ARROUET le 05 décembre 2023 - n°2297 de La Lettre du Maire
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