Charleville-Mézières crée une mutuelle communale Abonnés
Entretien.
La Lettre du Maire : vous êtes donc partis du constat que 4 % de la population de la ville n’avaient pas de mutuelle ?
Frédéric Jolion : oui et même du constat, plus dur, que 4 % des gens renonçaient à se soigner faute de mutuelle, pas même la C2S (complémentaire santé solidarité) qui a remplacé la CMU. 4 % de la population, cela correspond à l’étiage national (de l’ordre de 5 %).
La LDM : certains habitants ne sont pas même couverts par la C2S ?
F.J : oui, ce sont souvent des personnes qui bénéficiaient d’une mutuelle quand ils travaillaient et qui n’ont pas conscience, dans une période de transition, lorsqu’ils prennent leur retraite, que cette couverture cesse. Il y a aussi des personnes qui maîtrisent mal la langue ou d’autres qui souffrent d’illectronisme, c’est-à-dire qui ne sont pas à l’aise avec l’informatique. Nous avons donc décidé d’agir, ce qui n’allait pas de soi car la commune n’a pas de véritable compétence en matière de santé, à la différence de la communauté d’agglomération qui est signataire d’un contrat local de santé.
La LDM : quelle est la valeur ajoutée de la ville dans l’opération ?
F.J : la ville joue un rôle d’intercesseur. Nous avons rédigé un cahier des charges que nous avons ensuite soumis aux mutuelles intéressées.
La LDM : avez-vous des exemples de garanties que vous avez pu obtenir et que n’aurait pas obtenues un assuré négociant seul ?
F.J : je vois au moins trois avantages obtenus grâce à l’intervention de la commune. D’abord, la garantie de stabilité des tarifs jusqu’à la fin 2025. Il arrive souvent qu’un assuré souscrive à une mutuelle, attiré par des tarifs intéressants, qui augmentent quelque temps plus tard. Nous avons obtenu une lisibilité sur plus d’un an et demi. Ensuite, toujours dans un souci de lisibilité et de transparence, nous avons négocié quatre niveaux de garantie, avec des tarifs progressifs selon la garantie souscrite (pour une personne seule de 70 ans au niveau 1, la cotisation 2024/fin 2025 sera de 62,83 euros par mois, pour un couple de 65 ans au niveau 2, il faut compter 122,20 euros). L’assuré s’est donc pleinement informé et ne découvrira pas a posteriori une clause écrite en minuscules... Enfin, l’assuré a la garantie d’un contact humain. Un agent dédié de la mutuelle familiale sera là pour répondre et recevoir les assurés de la mutuelle.
La LDM : une fois le cahier des charges rédigé, vous avez donc lancé un appel à projets ?
F.J : oui, nous ne sommes pas dans le cadre de la commande publique. La ville ne gagne rien, ne paye rien. Elle négocie une prestation et des tarifs au profit de ses habitants. Tout au plus, utilise-t-elle ses moyens de communication (affiche, réseaux sociaux, journal municipal) pour faire connaître la prestation à ses habitants.
La LDM : quel est le public ciblé ?
F.J : la mutuelle est d’abord ouverte aux habitants de la ville mais également à ceux qui y travaillent, sans condition d’âge ou de ressources (à partir de 86 ans, le tarif n’augmente plus). Les demandeurs d’emplois, les retraités, les artisans ou les étudiants sont cependant les publics ciblés en priorité. Le premier habitant ayant souscrit est un étudiant de 20 ans (l’offre de formation dans le supérieur s’est développée ces dernières années à Charleville-Mézières). On peut supposer que la mutuelle intéressera également les retraités qui voient les tarifs de leur mutuelle exploser au fur et à mesure qu’ils avancent en âge. Et elle intéressera sans doute les indépendants et les autoentrepreneurs, les salariés du privé bénéficiant, pour leur part, d’une mutuelle obligatoire.
La LDM : Charleville-Mézières est la ville-centre de la communauté d’agglomération Ardenne Métropole, l’autre ville d’importance étant Sedan. La mutuelle s’adresse également aux personnes qui travaillent à Charleville sans y vivre. Peut-on envisager une extension de l’expérience dans d’autres villes de l’agglomération ou du département ?
F.J : oui, c’est le souhait du maire, Boris Ravignon, que le succès de l’expérience incite d’autres communes ardennaises, dont une partie de la population est précaire, à s’inspirer de notre exemple.
Michel Degoffe le 15 octobre 2024 - n°2335 de La Lettre du Maire
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