On peut tout reprocher à Nicolas Sarkozy sauf d’être démagogue, du moins dans sa relation avec les 500 000 élus locaux. Lors de sa récente allocution télévisée, il les a collectivement tenus pour responsables - en partie- du gigantesque déficit public de la France. Et pour faire bonne mesure, il a annoncé que les dotations de l’Etat aux collectivités locales, qui représentent en moyenne 30 % de leurs recettes, seraient modulées en fonction de leurs efforts pour contenir leurs dépenses. Le projet laisse perplexe car on ne voit pas quels pourraient être les critères de cette modulation. Ajoutons que la plus grande partie des dépenses locales échappe à la décision des élus locaux puisque ceux-ci sont contraints d’exercer des compétences que l’Etat leur a déléguées et, qu’au surplus, les rémunérations des fonctionnaires territoriaux suivent des directives nationales et non locales. Il serait opportun aussi que le chef de l’Etat distingue entre ces collectivités locales dont les budgets sont insignifiants par rapport aux services qu’elles rendent - en particulier les petites et les moyennes communes - et les grosses machines régionales où la relation entre le coût et l’utilité n’est pas facile à démontrer. Un soupçon d’autocritique ne nuirait pas non plus puisque, à en croire la Cour des comptes, les communautés de communes contraintes par le gouvernement semblent coûter plus cher que les communes prises séparément.
Derrière les attaques récurrentes contre les dépenses locales, la démocratie locale et le dévouement des cinq cent mille élus locaux, on retrouve l’influence du ministre de l’Intérieur : son expérience antérieure de préfet semble lui avoir laissé un mauvais souvenir. Chercherait-il à se venger des résistances locales à son autorité naturelle ? Peut-être, mais il devient difficile, disent souvent les élus locaux, modérés pour la plupart d’entre eux, de soutenir un gouvernement qui les traite avec autant de condescendance.
Guy SORMAN le 31 janvier 2012 - n°1751 de La Lettre du Maire