Éditions Sorman

Mais les églises et autres édifices religieux anciens, patrimoine historique de la nation, appartiennent aux collectivités locales qui les entretiennent ; les fidèles ont la disposition des lieux. Ces conventions relativement claires fonctionnent à peu près sans encombres et les conflits sont rares. Jusqu’à ces années récentes où s’est posée la question de la construction de synagogues à la suite d’un important rapatriement des juifs d’Afrique du Nord, puis de l’immigration plus massive de musulmans. Dans le premier cas, les communes concernées contournent l’obstacle juridique en subventionnant non pas l’édification de lieux de culte - ce qui est interdit - mais en finançant des «lieux culturels» juifs, ce qui est autorisé. La distinction du cultuel et du culturel est parfois malaisée mais on note peu de conflits. L’édification de mosquées, on le sait, est plus problématique, en raison du nombre des fidèles, de l’absence de précédent et des réticences publiques. En principe il revient aux communautés des fidèles de trouver les fonds mais ces populations souvent modestes recourent à des aides venues de l’étranger parfois obscures. Sous couvert de l’aide à la culture musulmane, les communes font l’appoint. 
La surprise, cette semaine, vient des Lilas, municipalité socialiste aux portes de Paris : la mairie y a fait édifier pour 4,6 millions d’€, une église neuve qui fut consacrée le 30 janvier au culte catholique. L’argument du maire est qu’il était plus économique de financer un nouveau bâtiment que de restaurer l’ancienne église devenue vétuste. L’interprétation ainsi faite de la loi de 1905 est habile mais elle crée un précédent dans lequel devraient s’engouffrer bien des revendications. Notre pays comptant environ 9 % de musulmans mais pas 9 % de mosquées, et bien que tous les musulmans ne réclament pas des mosquées, peut-être est-ce la loi de 1905 qu’il conviendrait de mettre à jour.

Guy SORMAN le 08 février 2011 - n°1706 de La Lettre du Maire